Note de la fic : Non notée

Les oubliés de Jabiim.


Par : case2000
Genre : Science-Fiction
Statut : C'est compliqué



Chapitre 9 : Réunion de famille.


Publié le 28/06/2012 à 15:27:06 par case2000

Mais déjà les bleus mutins, c'est à dire les troupes régulières qui nous avaient rallié, montèrent à l'assaut dans un merveilleux cri de rage. Ils étaient appuyés par des blindés du 2 ème de reconnaissance qui cette fois semblait de notre côté. Menés par de bien fiers lieutenants la première vague de révolutionnaires, muée d'une furieuse détermination, s'approcha des tranchées républicaines. La Mort, avide d'âmes, poussa un sinistre hululement. En quelques minutes la plupart des rebelles furent pris à parti par des dizaines de mitrailleuses. Bientôt des centaines d'autres tirs fusèrent des positions loyalistes avant de s'abattre sur les assaillants. Après seulement quelques mètres de course folle les trois quarts des nôtres avaient déjà péris. Les lieutenants, visés en priorité par l'ennemi moururent tous dans d'atroces souffrances. Tandis que les blindés qui accompagnaient les fantassins, violemment pris à parti par l'artillerie et les chars adverses, disparurent tout aussi rapidement. Désormais transformés en un amas de tôle broyée et de chair brûlée. La poignée de soldats atteignant les tranchées loyalistes fut balayée dans un tourbillon de baïonnettes républicaines. Désireux de se mêler au carnage les obus s'écrasaient par dizaines dans la zone de combat, démembrant les agonisants et ensevelissant les morts. Quelques uns de nos brancardiers s'élancèrent afin de secourir au moins deux ou trois hommes de ce désastre. Ils furent impitoyablement mis en joue par les républicains qui tuèrent ces imprudents en dépit de tout code d'honneur. Pas un homme de la première vague n'avait survécu.


La deuxième vague commença à se rassembler. L'ambiance y était morbide, les visages crispés. Tous étaient conscients qu'ils ne finiraient sans doute pas mieux que leurs feu compagnons d'armes. Au coups de sifflet la moitié d'entre eux, tétanisés et pétrifiés par l'horreur, refusa d'avancer. Les lieutenants, friands de discipline, brutalisèrent ces pauvres hères afin qu'ils se mettent en marche. C'est à coup de fouets que la seconde vague partit à l'attaque. A l'instar des soldats de la première vague, ceux de la deuxième moururent, comme des chiens. N'ayant même pas eu l'honneur d'aboyer une ultime fois avant de succomber. Fin stratège, celui qui commandait l'assaut installa des mitrailleuses dans le dos des hommes de la troisième vague, prêtes à tirer sur les potentiels retardataires. C'était sans doute là son moyen de motiver la troupe après le funeste destin des deux précédentes offensives. J'atteignis enfin la tente de commandement tandis que la troisième vague s'élançait. Cette fois-ci je ne saurais dire si le plus grand nombre des pertes fut causé par nos mitrailleuses ou les leurs. D'autres fantassins s'amassèrent encore...

Sans nul doute possible l'assaut était orchestré par Taardan. L'ogre n'était pas bien difficile à reconnaître. Géant de plus de deux mètres de hauteur à la barbe et chevelure hirsute. Ses yeux bruns semblaient briller d'un étrange éclat, comme s'il jouissait du massacre qui s'étendait devant nous à perte de vue. Il était surnommé le « Boucher de Trantor » en l'honneur des émeutes qu'il avait sévèrement réprimés dans la ville du même nom. A l'époque il exerçait encore la fonction de Commissaire Général des forces de la Protection Civile dans cette cité. Le Congrès lui avait ordonné de restaurer le calme dans les rues après plusieurs nuits consécutives de troubles citadins. C'est ce qu'il avait fait : à coup d'obus dans la foule. Il avait ensuite nettoyé les barricades des émeutiers au lance-flamme. Devant l'indignation et la répulsion de l'opinion publique. Ce défenseur de l'ordre et de l'autorité avait été finalement désavoué par sa hiérarchie, puis par le Congrès qui le poussa à la démission. Humilié et abandonné. Ce furent ses seules récompenses pour avoir fidèlement obéit au Congrès. Stratus l'avait recueillit parmi nous. Admiratif devant le calme herculéen de l'homme lors du nettoyage de Trantor, Stratus le félicita et lui fit l'accueil digne de ce que Taardaan était : un héros.

Doté d'une force de Rancor il était capable, disait-on, de broyer ses ennemis à mains nues. Pour ma part actuellement je trouvais qu'il avait surtout hérité de l'intellect du monstre. Partisan de l'offensive à outrance Taardan était en train d'envoyer au massacre nombre de ceux qui s'étaient ralliés à notre cause, sans aucune once de tactique ! J'étais déçu, c'était la première fois que je le voyais en action et le Boucher m'apparaissait plus comme une espèce de brute taciturne peu soucieuse des pertes, que comme un véritable officier de terrain compétent. Cet homme était peut-être à l'aise lorsqu'il s'agissait de châtier quelques fauteurs de troubles urbains, mais en bataille rangée il ne valait manifestement pas grand chose. Fidèle à sa flegme réputation, le Boucher, (il adorait quand on le nommait de la sorte) se contenta de hocher la tête, satisfait devant la quatrième vague qui avait déjà été décimé. L'endroit allait bientôt s'apparenter à un charnier si cela continuait. Il était protégé par quelques Nimbus. Quel gâchis ! Mes commandos méritaient bien plus qu'être de simples chiens de garde ! Mais je devrais m'estimer heureux, au moins il ne les avait pas envoyé en première ligne... Cette garde prétorienne improvisée et sa tente était placée relativement loin de la zone de combat. Hors de portée des mortiers ennemis tout au moins.

. A côté de la tente avait été installé un hôpital de campagne. Le Boucher était plongé en pleine conversation avec Sevenna. Soutenant les blessés, couvrant les morts d'un dernier regard d'adieu. Sevenna, flamboyante beauté reconnaissable entre mille créatures. Dont la chevelure noir de jais virevoltait au vent comme un oriflamme des temps anciens. A vrai dire elle ne discutait pas vraiment avec le Boucher, elle lui hurlait plutôt dessus. Son caractère enflammé lui avait valu l'appellation de « Fille du feu ». A l'origine quolibet de quelques officiers détracteurs (l'entente n'était pas toujours idyllique entre Capitaines de l'Armée de Libération), elle s'en était emparé pour forger son image : somptueuse créature de rêve aux hanches généreuses et à la poitrine opulente qui au moindre écart de conduite de votre part pouvait tout aussi bien vous étripez avec son arme. Même Weiramont, pensant toujours plus aux femmes qu'au combat, avait renoncé à lui faire grâce de ses attitudes paillardes et déplacées. Il faut dire que la seule fois où le bougre avait essayé de la caresser, Sevanna avait bien failli lui couper la main et lui crever les yeux. Pour elle c'était la seule chose raisonnable à faire pour qu'il renonçât à ses m½urs débridées et dépravées. Mais le Commandant Stratus fut d'un autre avis et défendit Weiramont comme toujours.

Parfois aussi accommodante qu'un Gundark, presque tout le monde avait du mal à s'entendre avec Sevanna. Elle n'en faisait souvent qu'à sa tête et même Stratus avait régulièrement des difficultés à se faire obéir d'elle. Mais c'était un officier comme on n'en voyait qu'un seul tous les cent ans : courageux, inventif, soucieux du bien-être de ses troupes. De surcroît elle détestait l?imbécillité, c'était les choix tactiques (ou plutôt leurs absences) de Taardaan qui avait du la rendre furieuse. Je la considérais comme une espèce d'exemple à suivre. Elle aurait pu volontiers être mon mentor s'il n'atteignait pas en réalité l'âge qu'aurait eu ma fille Lysia. Ma pauvre petite tu serais tellement belle aujourd'hui. Mais ne t'inquiète pas Papa te vengera bientôt. Ne te l'avais-je pas promis après tout ?

Le jeune âge de Sevanna ne faisait que m'impressionner davantage. N'ayant pas connu l'invasion Trandoshane, n'étant encore qu'une enfant lors des raids Lithiens. Elle s'était lancée tout récemment dans l'art du commandement. Étoile montante de l'Académie Jabiimienne, elle n'avait pourtant pas hésité à rejoindre la dissidence. Charmée par les idéaux d'égalité qui formaient le ciment de notre opposition. Il convient de rappeler que la misogynie était encore très répandue dans les rangs de l'armée régulière. Ce qui n'était pas du tout le cas dans l'Armée de Libération. Sevenna n'était pas de celles qui avait le plus souffert de ce maux. Mais cela ne l'empêchait guère de trouver fortement injuste, le fait, que des soldats prometteurs puissent être ainsi évincés des hauts grades sous prétexte que ces personnes furent des femmes. Quelle ironie, elle ferait sûrement encore partie de l'Académie si le décadent Congrès avait offert plus de possibilités de carrière à la gente féminine. Si nos députés avaient ouverts les yeux à temps Sevenna eut été un Général des Armées, sans doute en train de nous combattre. Béni soit le destin qui en décida autrement.

Pour ma part je n'avais jamais eu de difficulté particulière avec elle. Elle semblait m'apprécier ou du moins me respecter un minimum. Vespasien disait que c'était parce qu'elle avait le béguin pour les hommes mûrs et veufs. Éternel plaisantin, Il ne savait vraiment plus quoi dire pour se rendre intéressant celui-là. Mais bon laisser circuler de telles rumeurs un peu folle était bon pour le moral de la troupe. Et surtout, vu que je n'avais pas encore été décapité par Sevenna cela ne devait guère la gêner outre mesure non plus.

Les deux autres capitaines de l'Armée de Libération m'entendirent approcher. Le Boucher me transperça de son éternel regard glacé. Il arborait en permanence un visage inexpressif sauf devant le commandant Stratus qu'il adulait. Sevenna, quoique très énervée, me décocha un sourire sympathique. Une fois de plus cela allait être à moi d'arrondir les angles. Du coin de l'oeil je vis le lieutenant Vespasien accourir vers nous. Mon fidèle second devait avoir une nouvelle cruciale à apporter s'il se permettait ainsi de s'immiscer entre les rapports de trois capitaines.


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