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Déboires d'un tueur à gages


Par : VinceBloom
Genre : Action, Sentimental
Statut : C'est compliqué



Chapitre 2


Publié le 21/10/2015 à 01:30:47 par VinceBloom

Il était 12h54 quand je rentrais de ma courte pause déj' et me préparais à une après-midi supplémentaire au chantier. Ah ça, je ne pouvais pas vraiment dire que mon métier me plaisait, ni que j'en étais fier d'ailleurs, en effet ouvrier bâtisseur n'est pas le truc qu'on rêve de faire quand on est gosse. Je sais que pour ma famille je ne serai jamais un père et mari exemplaire, mais je suis pourtant certain qu'on se souviendra plus tard de moi comme un chic type qui se débattait d'entre les galères lui tombant sur la tête et tentait noblement de joindre les deux bouts et de subvenir aux besoins de ses proches. Cette pensée m'est drôlement rassurante et m'aide à tenir jour après jour sur ce gigantesque chantier.
Je ne sais même pas ce qu'ils prévoient d'installer dans ces futurs grandes tours, des logements, des bureaux, des chambres d'hôtels peut-être ? De toute manière, tout ça ne nous regarde pas, à croire qu'on est les pauvres moutons qui obéissent et suivent leur berger sans rien demander à personne.
Souvent, je me demande comment j'ai bien pu me démerder pour me retrouver au fond du trou comme ça, et c'est très bête de me répéter cette question à longueur de journée puisque la réponse est toute simple : comme tous les pauvres péquenauds à mon image de cette foutue société, j'ai merdé quand j'étais jeune, sans doute à cause des voyous que je côtoyais à l'époque, et me suis mis à faire un tas de conneries. Comme la grande majorité, un petit séjour derrière les barreaux m'a ouvert les yeux et m'a par la suite mis en tête de devenir un type bien. Ça a été compliqué, mais aujourd'hui grâce à mon job et à quelques coups de pouce d'ailleurs j'ai pu réussir à m'en sortir.
J'ai pas vraiment besoin de vous expliquer ce que sont ces quelques aides, vous savez tous ce que c'est, le marché noir. Je m'étais juré pour ma femme et mes gosses de ne plus jamais toucher à ces trucs-là, mais à un moment donné il y a quelques années de ça où je m'étais retrouvé très endetté et confronté à la menace d'être jeté à la rue avec ma famille, j'ai craqué. Ça n'a pas été très compliqué de gagner quelques billets dans ce milieu, il suffisait de faire un transfert par ci, une livraison par là... Et à chaque fois ça ne manquait pas, la prime était toujours présente et à la hauteur.
Pourquoi j'ai arrêté, maintenant ? Ben comme je vous l'avais dit, j'avais très peur de retomber dans la délinquance, et puis il y a bien quatre mois de ça un bête accident est arrivé... Oh, rien de grave, et puis j'ai pas vraiment envie de rentrer dans les détails, mais j'ai fait une erreur pendant un transfert. J'étais simplement censé transporter une mallette à priori très importante jusqu'à une certaine adresse, et j'ai été trop curieux. On m'avait pourtant choisi comme homme de confiance car faisant ce boulot sans fautes depuis des années, et puis j'ai déconné.
Je m'en souviens très bien, elle était là, toute rayonnante et posée sur le siège passager de ma voiture, et je m'étais arrêté prendre de l'essence. Avant d'aller à la borne, je me suis garé sur une place de parking de la petite boutique et me suis jeté sans réfléchir sur la mallette. Elle était bien sûr verrouillée, mais on m'avait en cas de grave problème confié sa clef. En tremblant, j'avais ensuite fait tourner cette clef dans la minuscule serrure soigneusement dissimulée des regards et avait ouvert en grand la mallette après avoir vérifié que personne ne me regardait.
Je n'en croyais pas mes yeux. Un magnifique pistolet du genre de ceux qu'on voit dans les films d'agents secrets plaqué or se tenait devant moi. De peur d'être remarqué et me rendant soudain compte de mon erreur, j'ai ensuite rapidement refermé la mallette en la reverrouillant et me suis rendu en vitesse au lieu qu'on m'avait désigné.
Quand je repense à la scène, j'ai maintenant le souvenir d'avoir entendu au moment où j'ai ouvert la mallette un bref tilt électronique comme celui d'une machine à l’œuvre. Était-ce le signe qu'on m'avait repéré ?
Je n'en savais foutrement rien et à vrai dire, je n'avais aucune envie de le savoir, c'est pour cela que dès le boulot achevé et ma prime touchée, je n'ai plus jamais remis les pieds au marché noir et me suis contenté pour faire vivre les miens de mon boulot d'honnête citoyen. J'avais vraiment peur qu'on me retrouve et qu'on me fasse payer mon égard de ce jour-là au début, mais les semaines et les mois ont depuis passé et désormais je ne m'en fais plus et me consacre entièrement à mon nouveau départ en tant qu'homme respectable dans la vie.
Il était à présent environ 13h30 lorsque Bruce me sortit de mes pensées:
"Hé, Marvin ! Dis-moi si jamais je t'emmerde, mais tu voudrais bien venir me filer un coup de main pour porter cette planche ?", me demanda-t-il avec un grand sourire. J'acceptai volontiers, et j'étais en train de me diriger vers lui quand je sentis un picotement dans ma nuque.
Surpris, je me stoppai brutalement, puis me sentis chanceler. Je ne comprenais plus rien à ce qui se passait autour de moi, et mon esprit semblait s'éteindre brusquement. Une fois à terre, la dernière chose que je vis avant de me retrouver dans le noir le plus total fut mon camarade Bruce qui accourait près de moi et me criait quelque chose que je n'avais pas la force de comprendre.


Cette fois-ci, il avait parfaitement visé, le tir était tout bonnement excellent. Il s'était installé sur le toit d'un vieux building avoisinant le site de construction et après avoir trouvé un angle de tir efficace avait dégainé de sa veste son long fusil de précision à fléchettes. Il en avait sélectionné une du pack mis à sa disposition et avait armé le fusil sur son épaule. Il avait ensuite patiemment attendu le bon moment pour tirer. La cible était alors en plein travail sur une portion de la façade du futur immeuble, et elle était à moitié dissimulée derrière une sorte de bâche en plastique, ce qui aurait rendu les chances de réussites du tir plutôt faibles. Il choisit donc la tactique de l'attente et patienta encore une quinzaine de minutes avant de voir en un grand ouvrier très costaud et au sourire bienveillant son salut. En effet, ce dernier semblait appeler la cible pour qu'elle vienne lui prodiguer son aide dans sa tâche. Le moment était venu.
La fléchette atteignit pleinement son objectif, à savoir le plein centre de la nuque de l'homme, qui s'effondra quasi-instantanément par la suite.
Son matériel à présent rangé, le tueur à gages, qui n'était devenu qu'un simple homme comme un autre sur un toit d'immeuble, resta immobile et prit le temps d'admirer le paysage urbain autour de lui comme il avait l'habitude de le faire à chaque fois après un contrat. Après tout, il avait largement le temps, les autres ouvriers travaillant au même étage que la pauvre victime venaient à peine tous d'arriver autour de son corps inanimé, et son copain au physique de bodybuilder semblait tout juste avoir remarqué la fléchette plantée dans son coup, ainsi la police ne serait pas sur les lieux avant une bonne demi-heure le temps que tout le monde reprenne ses esprits.
Son regard, après avoir parcouru le morne enchevêtrement de béton s'enchaînant ça et là, s'arrêta un moment sur le fleuve qui coupait en deux la cité. Il se vit alors parcourir ce fleuve au moyen d'une embarcation de fortune puis gagner l'extérieur, le grand air des campagnes et des forêts, et puis enfin l'océan, vaste horizon de bleu ne semblant jamais prendre fin...
Un des premiers courants d'air frais de ce début d'automne le coupa de son rêve et le fit rappeler une énième fois l'engagement qu'il avait du prendre vis-à-vis de cette ville. Tant que des gens détenaient une quelconque forme de domination et d'autorité sur lui, il ne pouvait la quitter ainsi que son sale boulot.
Avec un interminable soupir, il regretta amèrement ses égards du passé et se prit comme il en avait l'habitude à penser à l'existence qu'il pouvait mener lorsqu'il était enfant et que la vie ne s'était pas encore amuser à se moquer de lui et à le tourner en ridicule. Pendant l'espace d'une demi-seconde, il réussit à sentir la douceur et la chaleur du sable enveloppant ses pieds nus, avant que la rudesse de l'asphalte ne reprenne finalement le dessus.
Il jeta un coup d’œil en contrebas de son immeuble. Une foule de travailleurs commençait à se presser sur le sol et à être évacué par leurs chefs qui étaient vraisemblablement en train d'appeler le commissariat le plus proche. C'était le signe de battre en retraite.
En remontant dans sa voiture, il se rendit compte que sa gorge était devenue très sèche : une bonne cuite dans les règles s'imposerait ainsi dès son retour à l'appartement.


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