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GamesPerfectNews


Par : Games
Genre : Réaliste
Statut : C'est compliqué



Chapitre 9 : Schyzophrenia


Publié le 12/03/2015 à 19:39:53 par Games

Une femme est assise sur un lit, contre un mur face une fenêtre. Seul l’éclairage public parvient à distinguer les éléments dans la pièce. Elle observe l’ombre très distincte qui l’interpelle.

« Tu fais quoi ? »

La femme reste fixée sur la fenêtre, sans bouger. Les muscles de son corps sont tendus. Elle parvient à articuler.

« Je sais pas »

Le silence se réinstalle dans la pièce. La femme saute soudainement du lit. Puis pose la main sur la poignée de la porte d’entrée. L’ombre la questionne encore une fois.

« T’as peur ? »

La femme continue de fixer sa main sur la poignée.

« Non. »

« Comment tu ne peux pas avoir peur ? »

« Parce que l’on n’a seulement peur de l’inconnu. »

La femme ouvre la porte et se retrouve dans un couloir d’immeuble. Elle la referme juste derrière elle.

« De quoi as-tu peur alors ? »

La femme continue de marcher.

« Je t’ai dis que je n’avais pas peur. »

« Tu trembles. Je peux presque sentir les vibrations. »

La femme continue son escapade dans les couloirs de l’immeuble au point de s’y perdre. La silhouette la suit toujours, apparaissant de temps à autre.

« J’ai froid. »

« Non, tu n’as pas froid. Tu as peur. »

« Je t'ai dis que je n'avais pas peur. »

Le ton de la jeune femme se durcit. Elle erre dans les couloirs, ne sachant pas au final où elle va. Les lumières clignotent aléatoirement, seul la lumière crue de la sortie de secours reste nette.

« D'accord, mais j'ai raison. »

La jeune femme fait volte-face vers la silhouette, les poings serrés et commence à marcher lentement vers elle jusqu'à s'arrêter à une dizaine de mètres.

« Si tu dis encore une fois que j'ai peur, ça va mal se terminer. »

Un air de défi et un masque de rage recouvrent le visage de la jeune femme.

« Tu t'es perdu dans les couloirs de ton propre immeuble, n'est-ce pas là un dénouement suffisant ? »

La garde de la jeune femme se baisse, la rage sur son visage vire à la stupeur. Elle tourne soudain frénétiquement la tête autour d'elle. Les lumières continues de clignoter.

« La sortie est pourtant à ta portée. »

Un doigt, indiquant la sortie de secours, sort rapidement de l'ombre. Il porte la même bague que celui de la jeune femme.

« Je ne veux pas sortir. »

La jeune femme est sur la défensive. Elle se crispe en voyant la réaction de son interlocutrice.

« Tu cherches à faire quoi ? »

« Rien. »

« Tu en es sûre ? »

« Oui. »

« Tu es perdue. Bien plus que tu ne peux le croire. »

L'échange se fait spontanément. Aucun des personnages ne marque de pose. Ils sont éloignés l'un de l'autre et pourtant ils continuent à parler à voix basses.

Un silence s'installe. Le grésillement des ampoules se fait entendre. Une porte s'ouvre soudainement entre elles et un homme en sort. Il ne semble pas remarquer leur présence. Il donne un coup d’œil furtif vers la jeune femme tout en continuant sa route puis disparaît dans les escaliers.

Les deux personnages se regardent, l'espace d'un instant, se dévisageant presque. La jeune femme, tout en continuant de fixer son interlocutrice, commence à marcher d'un pas rapide vers les escaliers.

« Il t'a vu mais il ne t'a pas observé. »

La jeune femme s'arrête, tétanisé.
« Les gens ne font que voir, ils n'observent pas. Tout comme ils ne font qu'entendre et non écouter. »

« Toi, il ne t'a pas vu. »

Les yeux de la jeune femme s'assombrissent. Elle continue de marcher vers les escaliers, se détournant de la silhouette. Arrivée hors de vue, elle commence à courir. Les escaliers défilent encore sous ses pas.

La jeune femme arrive à un palier. Elle a le temps d'apercevoir une porte qui se ferme. Elle se précipite vers celle-ci, ayant en tête d'intercepter l'homme. La silhouette a disparu. Elle ralentie le pas pour finalement s'arrêter devant la porte. La jeune femme fixe la poignée, finalement sceptique à l'idée d’appeler à l'aide.

« Il va croire que je suis folle. »

La jeune femme se prend le visage dans ses mains, respirant profondément. Elle frappe brusquement à la porte et attend, ne sachant toujours pas quoi lui dire.

Personne ne répond, aucun bruit ne se fait entendre à l'intérieur. Le calme s'installe autour d'elle. Pas un bruit si ce n'est celui de sa respiration qui vient perturber le silence.

« Parce que tu l'es. »

La jeune femme se retourne. Personne n'est présent dans le couloir. Elle perd soudain le contrôle et s'engouffre à la volée par la porte devant laquelle elle se tenait.

Elle claque la porte derrière elle. L'obscurité règne. Seul la lumière de l'éclairage public parvient à contraster l'opacité ambiante. Elle reconnaît certain détails. L'ombre portée d'une étagère, une feuille blanche posée sur une table à la lueur d'une bougie en fin de vie. Il s'agit de son appartement, pourtant situé quelques étages plus haut.

« La vie est une boucle perpétuelle. »

« Tu ne devrais pas en faire partie. »

« Et pourtant je suis là, à contempler ta longue descente vers le néant. »

« Je n'ai pas demandé ton aide. »

« Ah tu as besoin d'aide ? »

La silhouette énonce cyniquement ses paroles. Suite à cet échange, la jeune femme se dirige lentement vers la fenêtre. Elle regarde par celle-ci.

« Que vois-tu ? »

« Des gens qui s'amusent. »

« Pourquoi n'y vas-tu pas ? »

« Je ne sais pas comment. »

« Par la fenêtre. »

Subitement, la jeune femme se retourne et observe la silhouette, sceptique.

« Je ne suis pas sûre. »

« Pas sûre de quoi ? »

« De ce que tu demandes. »

« Je ne t'aurais jamais amené ici sinon. »

« Pardon ? »

« Es-tu sûr d'être consciente ? »

« Pourquoi ? »

« Quel jour somme-nous ? »

« Arrête avec tes questions. »

« Réponds alors »

« Je n'en ai pas envie »

La jeune fille sort de l'appartement, se tenant la tête avec les mains. Elle parcourt le couloir, lentement, laissant entrevoir une fatigue de plus en plus prenante. Une véritable fresque d'expression faciale lui traverse le visage. Colère, incompréhension, amertume. Elle s'arrête de marcher puis se retourne vers la porte de son appartement. Elle la regarde longuement.

« Tu hésites. »

« Tu perds ton temps. »

« A faire quoi ? »

« A faire ça. »

« Je ne fais rien. »

« Laisse moi tranquille. »

« Non. »

« Je n'ai plus envie de jouer »

« Tu penses que c'est un jeu ? »

La voix de la silhouette se durcit à son tour. Une soudaine apathie pointe dans ses paroles. Une colère contenue se fait entendre.

La jeune femme se détourne, blasée, de la porte et se dirige vers les escaliers, à la même allure.

« Tu fuis. »

« Non, je cherche une autre issue. »

Elle continue à descendre les escaliers. Étage par étage, presque au ralenti. 5,4,3,2,1,5,4,3,2,1,

La jeune femme prend en compte petit à petit le fait qu'elle tourne en rond. Son expression, sa démarche, tout porte à croire que le fatalisme l'emporte sur sa lucidité. Elle se laisse bercer par le rythme de ses pas, ralentissant de plus en plus pour finalement se poser sur la première marche du 5e étage. Elle balaye d'un œil vide l'escalier, tentant de se raccrocher à un détail qui lui permettrait de quitter cet endroit.

« Je te croyais plus futé. »

La jeune femme se tait. La silhouette s'avance par le fond du couloir dont seul ses pas feutrés résonnent légèrement. Elle semble vaciller.

« Suis moi. »

« Es-tu consciente ? »

La silhouette, tournant le dos à la jeune femme, persuadée que celle-ci la suivrait, est stoppée nette dans son mouvement. Un silence s'installe brutalement.

La silhouette se retourne puis s'avance à la lumière.

« Tu commences à poser les bonnes questions. »

« Réponds. »

« Non. »

« Non quoi ?»

« Non je ne suis pas consciente. »

La jeune fille se recule, puis sourit.

« Comment s'est-on rencontré ? »

« Je ne sais plus. »

« Si, tu dois le savoir. »

« Non je ne le sais pas. »

« Si tu le sais. »

La silhouette se recule à son tour, disparaissant de la lumière.

« C'est bientôt terminé. »

Le vide emplit à nouveau l'espace. Le silence règne à nouveau. Les grains de poussière flottent encore dans la lumière. La conscience de la jeune femme se stabilise. Elle est calme, elle semble apaisée. Elle retourne à son appartement, se dirige vers sa salle de bain et se contemple dans le miroir. Un visage fatiguée apparaît. Le sien. Un sourire aiguisé se dessine sur les lèvres. Celles de son reflet, pas les siennes.


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