Note de la fic : :noel: :noel: :noel: :noel:

Mon monde


Par : faces-of-truth
Genre : Nawak
Statut : Terminée



Chapitre 1


Publié le 23/01/2011 à 13:10:40 par faces-of-truth

Mon monde n’est pas le vôtre. Le mien a l’avantage d’être unique, car je suis le seul à le connaître. Aucun n’est comparable. Et il vous est tout simplement impossible de l’imaginer. Cet univers est à moi, il est parmi vous, mais vous ne le voyez pas. Quelle ironie. Ma vie a été bâtie dans cet espace, et elle n’aurait pas suivi le même chemin si j’avais été élevé parmi vous. J’aurai été un des vôtres.

Dans mon monde, les objets ne sont pas comme chez vous. En fait, il n’est aucune notion de couleur ; notre ciel était aussi bleu que les champs de blé et nos arbres aussi verts que les flammes d’un incendie en quelque sorte. Aussi, les gens ne sont pas distingués pas ce qu’ils sont extérieurement, mais par ce qu’ils font. Leurs actes seuls déterminent leur statut dans la société. Des blancs ? Des noirs ? Des jaunes ? Des violets ? Des beaux ? Des laids ? Ceci n’existe pas. Il y a des Honnêtes, des Justes, des Tricheurs et des Profiteurs.

Plus je grandis et moins les femmes m’intéressent. Elles ne répondent plus aux critères de mon monde à présent, puisqu’elles jouent sur des notions inexistantes pour se donner corps. Mon monde entre en collision avec le vôtre parfois, et nos accords divergent alors, car vous ne voyez pas ce que je vous montre ou vous fais sentir. Mais je ne vous en veux pas pour ça, vous n’avez pas la chance de le connaître.

Dans mon monde, les fruits ont plus de goût que dans le vôtre, et je connais chaque centimètre carré de la ville dans laquelle je vis, alors que vous, n’en avez qu’un infime souvenir puisque vous parcourez tous les jours la même rue, mais en pensant à autre chose. Chez moi, le Soleil ne s’appelle pas Soleil. Déjà, nous n’avons pas d’astres célestes. Nous avons un drap qui vole dans les airs, un drap plus doux et plus agréable que le velours le plus fin qui soit. Ce drap, il s’appelle la Versée. C’est une merveille qui se pose parfois sur nos peaux pour nous réchauffer. Mais la Versée est parsemée de failles, et lorsque l’une de ces failles se trouve sur nos têtes, elle permet au ciel de s’abattre sur nous. Cet évènement s’appelle la Chute. Elle est plus ou moins violente, et peut-être couplée à la force du vent.

Mais dans mon monde, tout n’est pas inoffensif. L’autre jour, par exemple, alors qu’un Profiteur m’avait lâchement arraché ma sacoche et que je voulais le poursuivre, une Déferlante a failli m’emporter. Comment ? Vous ignorez ce qu’est une Déferlante ? Eh bien, il s’agit d’une entité extrêmement dangereuse qui vit dans les Cours (un Cours est une longue ligne terrestre sur laquelle se trouvent les Déferlantes) qui ressemble à une grosse vague et qui pousse un cri très rauque. On en entend souvent la journée de toutes sortes qui hurlent à mort, d’autres chantent parfois, mais ces dernières sont très rapides et poursuivent d’autres Déferlantes). Il faut faire preuve d’une énorme vigilance à leur égard.

Il ne fait jamais jour et il ne fait jamais nuit. Je laisse libre mon corps de me dire quand il sent qu’il est plus sage de s’endormir. J’ai aussi un travail, mais comme je vous l’ai dit plus tôt, cela implique que mon monde s’interpose avec votre vision des choses, et la communication s’avère bien plus difficile.

Dans mon monde, les objets sont jugés selon leur résistance, et non par leur esthétique. Je ne préfère pas ce que vous choisiriez au premier abord, parce que la notion de prétention y est étrangère, et tout snobisme inexistant. Le voyeurisme aussi est absent. Ainsi, la télévision est un matériel qui n’a aucun intérêt dans mon monde. La musique, cependant, est une religion. Chaque note de chaque instrument transcrit une émotion différente. Et je ressens toute la teneur de ces milliards de sons plus profondément qu’aucun de vous ne le pourra jamais.

Je sais ce que vous vous dîtes. Ce que je raconte n’a aucun sens. Mon monde n’existe pas. Il n’y a jamais eu tout ça, rien de ce que je narre n’existe. Le voilà le problème. Vous ne voyez pas ce que moi je vois. Nous avons un seul et unique point commun : c’est la Nature. Et elle m’a permis de distinguer des choses que vous ne pouvez observer.

Aujourd’hui, je me rends à la limite de mon monde. Là, la Versée est loin en arrière. En fait, je ne devrais pas être ici tout seul. C’est réputé pour être très dangereux. Je suis au bout de ma terre, la fin de mon univers. Devant moi se tient un monstre gardien long d’un million de mètres, qui pousse un grognement à la fois terrifiant et magnifique, comme pour m’avertir, me prévenir de ne pas faire un pas de plus.

Mon monde est écrasé par le vôtre, on m’a même catalogué avec un adjectif pour me discerner de la majorité. Mais au final, rien ni personne ne pourra déterminer celui qui a connu le plus de choses. Car la réalité a ses vérités. Et il est libre à chacun de saisir celle qui lui apparaît en premier.

La Bête me voit venir sur son territoire, elle m’entoure alors et me prend dans ses bras. Voilà. Maintenant, je connais tout de mon monde. Un jour peut-être mon corps sera retrouvé et vous me qualifierez d’insensé ou d’imprudent. Je n’aurais pas vu vers quel danger je me précipitais.

Mais au final, qui d’entre vous et moi est le véritable aveugle de naissance ?


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