Note de la fic : :noel: :noel: :noel: :noel:

Révolution!


Par : Conan
Genre : Action
Statut : Terminée



Chapitre 36 : Chaos


Publié le 04/06/2011 à 20:24:01 par Conan

Je nage, malgré les balles qui fendent l'eau tout autours de moi, je nage, encore et toujours, tel une bête prise en chasse qui ne peut se résigner, alors que tout s'écroule autours d'elle, à se laisser abattre.

L'eau est visqueuse, on n'y voit pas à 20 centimètres tant elle est crasseuse. Ce n'est qu'en me heurtant contre un mur que j'ai la certitude d'avoir atteint l'autre rive. Avec toutes les forces qu'il me reste, je me hisse à un anneau d'ammarage et m'extirpe de cette flotte vaseuse.

A peine relevé sur le bord du quai, je m'affale sur les pavés chauffés par le soleil. L'absence de coups de feu m'informe que mes poursuivants ont perdu ma trace ou s'en sont allés, mais pas moyen de me retourner pour jeter un œil : je suis tétanisé. Échoué comme un cétacé agonisant, je regarde le pont d'Austerlitz à une centaine de mètres. Du moins ce qu'il en reste. Il n'y a plus rien qu'un gros bloc de béton conique planté dans l'eau. Tout le reste a été détruit par l'artillerie loyaliste. Des corps déchiquetés par les bombes et les mitrailleuses flottent autours du cône fissuré qui menace de s'écrouler sur lui-même.

Je rassemble toutes mes forces pour me mettre à genoux et tenter de me relever, mais je n'y arrive pas, j'ai les jambes en coton. Ne faisant que cracher et glairer, me voilà à la merci du premier tireur venu. Ce sont finalement deux gosses d'à peine quinze ans aux airs de Gavroche qui m'aident à me relever puis me ramènent fièrement jusqu'à un petit groupe d'insurgés réorganisé de manière Spartiate à seulement une cinquantaine de mètres de mon point d'échouage.

Je m'accroupis entre deux hommes tenant fermement leurs fusils mitrailleurs et agrippe mon revolver d'un geste automatique. En vérifiant l'état de mon arme, je demande combien de partisans ont pu s'échapper et où se trouvent les autres rescapés. "Aucune idée" me répond l'un d'entre eux.

Dégouté. Je me relève et pars à la recherche d'éventuels survivants errant dans le secteur. Il y a plus loin trois types affolés qui cherchent un chef. Ils m'apprennent qu'un gros groupe dirigé par Ritchie s'est engouffré dans les sous-sols de la ville et que Beaussant tente avec une poignée d'hommes de contenir l'avancée des troupes ennemies au Petit Pont et au Pont Saint Michel, au cœur de Paris.

Nous décidons de rejoindre les défenseurs, situés à 600 mètres. C'est sans doute de là-bas que vient le fracas de bataille ambiant. Suivi de mes trois comparses un peu perdus, nous arrivons au cœur du combat. Les balles fusent de partout, des explosions secouent le sol et enfument le quartier. Je trouve finalement Beaussant à couvert derrière un muret à l'entrée du Petit Pont, tirant un peu au hasard en direction de la fumée de l'autre coté.
-Ils sont des centaines! On pourra pas tenir sans renforts! Me hurle ce dernier.
-Est-ce que vous avez des armes lourdes?
-Rien! Tout ce que possédait ma section est resté à la Bastille! Combien d'hommes t'as avec toi?
-Juste ces trois-là! Ritchie est quelque part sous terre, et ils ont eu Jack!
-Quoi?
-Jack a été capturé!
-Bordel, c'est pas vrai!
Un avion de chasse passe au dessus de nous et largue une bombe au phosphore sur le pont. Tous nos gars se trouvant à coté sont brulés par cette lumière aveuglante et les dépôts incandescents qu'elle dégueule tout autours.
Beaussant lève son bras : "c'est foutu! Repliez-vous! Repliez-vous!"

Nous détallons tous pour nous engouffrer dans les bâtiments et stations de métro aux alentours afin d'échapper à la prochaine attaque aérienne tandis que chars et soldats ennemis franchissent la Seine. Planqués derrière un comptoir, Beaussant et moi regardons amèrement les loyalistes prendre possession des lieux à travers la grande vitrine à moitié brisée du restaurant dans lequel nous sommes réfugiés. Il se relève et pose ma main sur mon épaule :
-Tirons-nous. C'est fini. Il faut rejoindre les autres.

Nous prenons la sortie de secours et nous retrouvons dans une petite ruelle.
-Et maintenant, on va où? Me demande mon ami.
Je regarde autours et désigne une bouche d'égout ouverte :
-On retrouve la section de Ritchie et on réorganise nos forces.
Je me dirige vers le gouffre mais Beaussant me retient :
-Attends. On a tout un tas de gars là dehors, qui sont complètement paumés. Il faut rassembler le plus de partisans possible en peu de temps. On n'a aucune nouvelle de Georges, Jack est entre les mains des loyalistes et Ritchie est sous terre. Il faut qu'un chef reste en surface.
-D'accord. Reste dehors, mais attention à ne pas te faire repérer.
-T'en fais donc pas pour ça.
Nous nous faisons l'accolade et il part au pas de course. Quant à moi, je m'engouffre dans les égouts.

Après avoir descendu l'échelle, je me retrouve les chevilles dans l'eau crade et puante. Aucune idée d'où aller, me voilà perdu en plein dans un labyrinthe de putréfactions.

Je marche, armé uniquement de mon revolver que je tiens fermement, le long des tunnels sombres qui me paraissent sans fin, accompagné par le glauque ruissellement de l'eau qui résonne.

Au bout de deux heures, toujours pas la moindre trace de vie, si ce ne sont quelques rats qui courent ici et là. Soudain, des voix viennent à moi. Il semble que ce soient des ordres, mais je ne parviens pas à reconnaître la voix d'un des chefs de l'ARF. Ce n'est que lorsque je me retrouve au détour d'un couloir juste derrière une patrouille de l'armée loyaliste que je comprends que les ennemis ont pris le contrôle d'une partie de la rive Sud et ont déjà en tête l'idée de déloger nos gars retranchés ici bas.

Je les suis de loin, le plus discrètement possible. Peut-être me mèneront-ils à Ritchie. Puis cela m'évitera le désagrément de les recroiser par hasard plus tard.

Au bout de quelques minutes de filature, la radio du chef d'escouade crache un flot d'informations. D'après ce que j'arrive à comprendre, un autre groupe est aux prises avec des insurgés. Les soldats rabattent leurs lunettes de vision nocturne et entrent dans un petit boyau aussi étroit que sombre. Je tente de les suivre mais ne vois strictement rien. J'ai peur de me prendre les pieds dans un obstacle.

Je marche derrière les militaires à l'ouïe. Leurs bottes frappent le sol et font clapoter l'eau stagnante. Des coups de feu résonnent dans les tunnels. De plus en plus nets.

Nous arrivons dans un couloir plus grand et mieux éclairé. Avant que les loyalistes ne fondent sur le groupe de partisans, je dégoupille une grenade et leur jette, puis je roule jusqu'à un abris et tandis que ma première grenade explose, j'en lance une autre à l'aveugle.

En me relevant, il n'y a qu'un seul survivant. Il est à terre, à demi inconscient. Je prends son fusil d'assaut et me dirige vers les tirs.

Me voilà au beau milieu d'une féroce bataille. Une trentaine de partisans sont postés derrière un amas de détritus qu'ils ont placés ici en vitesse. En face, une bonne cinquantaine de soldats qui sont à découvert et tentent une percée. Moi, au milieu, ne sait que faire.

Je m'en retourne vers les soldats que j'ai attaqués à coups de grenade et me met à leur faire les poches. Certains corps sont vraiment en piteux état. C'est sur le chef, qui s'est évanoui, que je trouve enfin ce que je cherchais : des grenades flash et des fumigènes. Je retourne sur les lieux de la bataille et lance toutes les grenades flash en direction des assaillants qui sont totalement déboussolés puis je sors de mon tunnel et cours vers les insurgés les mains en l'air :
-Ne tirez pas!
Une ombre se lève parmi eux et m'interpelle. Je reconnais la voix de Ritchie.
-Conan, c'est bien toi? Viens là, vite!

Je saute derrière leur petit talus et me mets à terre. Une autre vague d'assaut arrive.


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