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Les Fantômes Peuvent Mourir


Par : BaliBalo
Genre : Polar, Réaliste
Statut : C'est compliqué



Chapitre 5


Publié le 01/12/2012 à 12:43:15 par BaliBalo

Il était quatre heures du matin et voilà où s’en trouvait le lieutenant Barrais après s’être remémoré les évènements depuis la veille au soir : appuyé non loin de la machine à café, un gobelet en plastique bouillant dans les mains. Il patientait depuis une bonne heure, attendant que Planchet veuille bien se souvenir de lui. Agacé par cette dépendance envers le commissaire, il avala une gorgée du liquide brûlant et fortement caféiné ce qui le fit frissonner. Beaucoup d’engrenages manquaient encore à la machine du meurtre, et cela taquinait l’esprit logique de Barrais. Notamment, il n’avait pas pu établir le mobile, ce qu’il appelait d’ordinaire l’énergie d’entrée : pourquoi Valentine Bertau-Jeannet avait-elle été tuée ? Une réponse évidente s’imposait à lui : la vengeance. Quatre enfants dont la vie avait été détruite par l’égocentrisme d’une mère, ces Quatre-là retrouvant l’être honni, voyant leur rage reprendre le dessus. Et à cet instant la glace qui enfermait ce désir de vengeance se brise, fondue par la colère, les Quatre qui se transforment en bêtes sauvages, assoiffées de sang, et font disparaître à jamais cette femme odieuse. Oui, les Quatre avaient bien pu commettre le meurtre, il était même évident qu’il s’agissait d’eux. Ils avaient tout, le mobile et les moyens, la haine et le pouvoir. Mais c’était cette même évidence qui dérangeait Barrais et lui soufflait que le mobile était tout autre. Mais alors pourquoi Valentine Bertau-Jeannet avait-elle été tuée ? Et de nouveau, la réponse trop certaine s’imposait… Les réflexions du lieutenant se répétaient, en boucle, roue dentée tournant dans le vide sans trouver sa sœur, celle qui ferait avancer la machine.

Barrais jeta le gobelet en plastique vide et rangea les mains dans ses poches. La droite entra en contact avec un objet méconnu, un objet qu’il avait oublié. Il sorti le collier de sa poche et l’observa. Il était certain d’avoir déjà vu cette chaîne et ce pendentif, cela lui semblait même important, voire crucial. Le bijou constituait vraisemblablement l’engrenage manquant, celui qui ferait bouger la machine, sa nécessité était certaine mais le problème du collier était tout autre : Barrais ne connaissait pas l’emplacement que le collier devait contenter dans les engrenages du meurtre. Le lieutenant avait la certitude que lorsque sa mémoire voudrait bien lui avouer d’où venait le collier, les rouages du crime tourneraient d’un cran en avant. Alors il chercha dans les tréfonds de son âme, examinant l’objet sous toutes ses coutures. Là-dessus, Planchet débarqua et tira Barrais de sa réflexion, s’excusant d’avoir mis autant de temps à le rappeler. Le jeune lieutenant fourra prestement le bijou dans sa poche, dissimulation de preuve, mais tant qu’il ne connaissait pas l’origine du collier, celui-ci n’avait aucune utilité pour l’enquête. Tourmenté par l’indice muet, Barrais suivi son supérieur dans son bureau et s’appuya contre la table tandis que le commissaire prenait place dans son fauteuil de cuir. Le silence dura quelques instants durant lesquels Planchet sembla fondre afin de se mouler parfaitement avec son fauteuil, puis Barrais lança :

« Le cadavre ?
— Rien à signaler, répondit froidement le commissaire, notre tueur est un sadique, c’est évident, c’est ce désir morbide qui l’a poussé à lacérer le visage de sa victime.
— Ou bien notre tueur n’est pas bien doué.
— Précisez lieutenant. Demanda Planchet, intrigué.
— Je pensais au film Edward aux Mains d’Argent, vous voyez de quoi je parle ?
— Le type avec des ciseaux à la place des mains ?
— Tout à fait commissaire, confirma Barrais, à un moment donné du film, Edward veut réveiller un homme et le touche au visage, avec ses « mains ». Du coup le visage l’homme se retrouve lacéré par les doigts-ciseaux du héros.
— Vous suggérez l’homicide involontaire ? demanda Planchet, sourire en coin
— C’est une hypothèse.
— Il faudrait que le tueur soit assez con pour garder son arme à la main en voulant donner des claques à la victime pour la réveiller. Pensez-vous que l’assassin soit aussi con ?
— Non, d’autant plus que j’ai des raisons de penser que le meurtre était prémédité, avoua Barrais ce qui fit naître une lueur d’intérêt dans les yeux de Planchet, Barrais reprit : En fouillant la cuisine, j’ai trouvé deux assiettes contenant les restes du même repas. J’en ai conclu que la victime avait peut-être reçu quelqu’un à dîner : son assassin qui avait prévu son crime en vue de cette rencontre.
— Intéressant, ponctua Planchet, je ferais dater le contenu de ces assiettes afin de corroborer votre hypothèse. Pourquoi m’avoir parlé d’Edward ?
— Pour vous perdre commissaire, pour vous perdre.

Le commissaire sourit, ce genre de jeu l’amusait sans le vexer. Barrais était talentueux, il avait de l’imagination et c’était un atout indispensable pour reconstituer un meurtre. Planchet était content de savoir qu’il laisserait le poste entre de bonnes mains. Il reprit :

— A force d’imaginer le plus compliqué vous oubliez l’essentiel, lieutenant. Je veux parler du rôle des Bertau. Il est évident que l’un d’entre eux à fait le coup, reste à déterminer lequel.
— Justement, c’est trop évident… commença Barrais, mais le commissaire le coupa immédiatement :
— Lieutenant, soupira-t-il, il faut savoir parfois aller au plus simple. Nous interrogerons les Bertau dans quelques heures, tour à tour. »

Le cœur de Barrais sauta dans sa poitrine. Certes il ne prouverait pas que les Bertau étaient innocents, il était plus que probable que l’un d’entre eux ai fait le coup mais il voulait croire en leur innocence, parce que Line était parmi eux. Ceci et surtout parce que se confronter à cette famille l’effrayait, un face à face avec chacun d’eux serait un combat, une joute verbale d’intimidation et d’interprétation. Les Quatre étaient des hommes et femmes d’affaire, des requins, ils savaient se défendre, argumenter, mentir et garder leur sang-froid comme des acteurs. Sans aucun doute l’interrogatoire des Bertau allait être le plus dur que le lieutenant avait connu et il avait peur d’échouer.


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