Note de la fic : :noel: :noel: :noel: :noel:

Sunrise


Par : Sheyne
Genre : Action, Polar
Statut : C'est compliqué



Chapitre 38 : Chapitre 25 - 1/1


Publié le 15/07/2014 à 13:17:50 par Sheyne

Lentement, des coups de talons résonnaient dans la chaleur ambiante. Un pas après l'autre, Elyne distribuait ses enjambées au compte goutte, se faufilant d'abris en flaques d'ombres telle une louve assoiffée. La démarche svelte, le port altier, la jeune femme poursuivait sa route jusqu'à sa destination. L'un de ses informateurs lui avait dégoté un plan pour se procurer un pistolet dans un lieu public. En effet, n'importe quelle armurerie lui aurait demandé de passer quelques permis de ports d'armes avant de daigner lui en vendre une, elle n'en avait évidemment pas le temps. Alors résolue, elle allait alimenter un circuit mafieux en achetant sa protection hors de prix.
Bientôt ses souliers quittèrent le goudron fumant pour s'enfoncer dans le sable chaud, longeant l'allée d'un petit parc. Semblant de désert, les volutes de vapeurs tordaient l'air ambiant, perturbant la vision à ses pieds. Seuls quelques rires d'enfants s'élevaient encore derrière les fourrés ; l'endroit restait baigné d'un calme pesant, écrasant presque, sous l'oeil fatal du soleil.
Où qu'elle pose son regard, personne à portée de vue. Personne à l'exception d'un unique garçon, patientant nerveusement sous l'insoutenable cagnard. De toute évidence agité, elle lui donnait un peu moins de la vingtaine. Immédiatement, ses foulées la conduisirent dans sa direction. C'était lui ; un cocard noirâtre près du nez et l'allure d'un jeune des banlieues trahissaient son attachement à quelque gang plus ou moins méconnu. Inquiète, elle ne put s'empêcher de remarquer une large tache de sang séché au pied du banc. Elle le héla en s'approchant :

« On m'a dit que vous pourriez m'aider.
— On m'a dit ça aussi. Il cracha par terre, comme pour se donner de l'importance. Qu'est-ce qui me dit que t'es pas une flic ?»

Soupirant de dédain Elyne leva les yeux au ciel. Aussitôt illuminées par les rayons, ses pupilles se tinrent de doux reflets cyan. Leurs démonstrations de profondes exaspérations effectuées, elles replongèrent sur son interlocuteur :

« Dans deux semaines, on est tous morts, c'est le chaos un peu partout et des accidents ont lieux dans tous les coins de la ville... Alors, dis-moi, pourquoi est-ce qu'un flic vous en voudrait pour un simple flingue ?
— Tu te prends pour qui pour me causer comme ça ?! Hein ? Sautant sur ses jambes il la fusilla sur place. T'as cru que tu pouvais te permettre de me manquer de respect ?!»

Mais déjà, la jeune femme ne l'écoutait plus ; son téléphone l'avait arrachée à la situation présente. Dérangée par l'emballement du garçon elle tendit sa main, un doigt levé en signe d'excuse, espérant le calmer un instant :

« Alo ? Ernest ?!»

Immédiatement, le jeune fronça les sourcils, semblant réagir à la situation il se calma un peu pour écouter la conversation.

« Vraiment, vous en avez un ?! C... c'est... fabuleux ! - avisant soudainement les traits crispés du garçon, elle abrégea. - Écoutez, je vous rejoindrai comme prévu, je suis occupée pour l'instant.»

Le téléphone claqua, s'enfouit dans son sac à main, avant de vibrer à nouveau. Par politesse cette fois-ci elle n'en tint pas compte, au lieu de quoi son visage s'illumina d'un grand sourire. Elle miaula pour l'amadouer :

« Pardonnez-moi pour mon manque de courtoisie, c'est vrai que vous ne pouviez pas savoir. À combien vous me le faites ? Je peux le voir ?
— Il est à sept cents balles. Grogna-t-il. Les sous d'abord.»

Pestant et soufflant allégrement, le garçon s'était calmé. Ses spasmes musculaires et son instabilité émotionnelle trahissaient l'usage récent de quelques sombres substances. Aussi, bien qu'ayant vécu pire situation, Elyne s'était volontairement rabaissée pour ne pas subir d'explosions colériques. Seulement, l'humilité ne suffirait pas, elle n'avait pas retiré autant et savait qu'elle s'exposerait de nouveau à sa furie. Manipulatrice, sa voix d'ordinaire si cristalline se fit triste et tremblotante :

« Je... n'ai que cinq cents dollars... Peut-être auriez-vous une arme... un peu moins bien à me proposer ?
— Mais ce n’est pas vrai ! Qui m'a foutu une conne pareille ?!»

Hurlant de rage, sa fureur se déversa sur le banc. Aussitôt, celui-ci se souleva d'un grand coup de pied, bascula à la renverse et retomba du même coup, emportant dans sa chute la colère l'ayant inondé. Mais tout cela cessa bien vite. Rapidement calmé et amadoué par deux grands yeux verts apeurés, le jeune molarda une dernière fois avant d'aboyer :

« Vas-y c'est bon, passe-moi le fric. De toute façon, je dois m'en débarrasser de cette camelote. Voilà, merci quand même, hein. Bon, alors t'attends que je sois parti et tu fouilles dans la poubelle, là-bas. - Ses mimiques se firent narquoises, vengeresses presque. - Il est... bien au fond.
— Hey ?! C'est une blague ?»

À peine sa phrase finie, le garçon avait tourné les talons. Ainsi, à mesure qu'il s'éloignait, la voix de la jeune femme reprit de l'assurance. S'élevant à nouveau bien fort, son timbre résonna de suspicion. Merde quoi, c'était un pistolet moisi maintenant ? Dans une poubelle qui plus est ?!
Lorsqu'elle eut pour toute réponse une simple invitation à la confiance avant qu'il ne s'enfuît en courant, son argent à la main, elle soupira de dépit et se pencha au-dessus du dépotoir. Dégoutée, son bras plongea tout entier dans les méandres du récipient. Mouchoirs, emballages cartons, vieilles bouteilles dégoulinantes... cherchant à tâton, entre les détritus, son invraisemblable butin, elle se mit à maudire haut et fort cet abruti. C'est vrai quoi. Qui donc cache des armes dans les poubelles de nos jours ?! Si encore il y avait eu foule dans le parc en situation normale, cela aurait pu être un moyen d'échapper aux contrôles de la police... Mais il n'y avait personne... Personne ! Et heureusement d'ailleurs... même si elle avait déjà dû faire bien pire, sa dignité en aurait pris un coup. Fouiller dans les poubelles devant des dizaines de regards indignés ; ça non !
Après bon... elle n'aurait pas vraiment eu le choix...

Prête à abandonner, le désespoir aux lèvres, la jeune femme poussa enfin un petit cri de victoire. Son poing s'était finalement refermé sur ce qui semblait être une crosse. Lorsqu'elle l'extirpa des immondices, son visage s'éclaira de ravissement. Ronronnant de plaisir, elle contempla l'achat reposant entre ses mains : un manche d'ébène brillant... et la brodure plaquée, semblant d'or d'un gros revolver doré.


Commentaires