Note de la fic : :noel: :noel: :noel: :noel:

Le jour où je suis devenu prof !


Par : Salmanzare
Genre : Sentimental
Statut : Terminée



Chapitre 12


Publié le 06/07/2009 à 23:21:59 par Salmanzare

- Je viens de l'apercevoir ! C'était elle!

Laissant Éd, je me mets à courir vers une petite ruelle. Bousculant sans vergogne les piétons qui se trouvent devant moi. Je manque de tomber en trébuchant sur une plaque d'égout à moitié ouverte. Je continue de courir. Arrive au bord de la ruelle, la respiration rauque et le souffle court. Il n'y a personne.

- L'ai-je rêvé ? Suis-je fou ?

Éd arrive enfin. Pose une main sur mon épaule et me lance un regard compatissant qui en dit long. Il se mordille nerveusement la lèvre inférieure. Cherchant vainement un mot, un phrase à dire pour me réconforter. Mais ça ne vient pas.

- Ne dis rien Éd. Je sais que t'es avec moi, ça me suffit.

Il hoche la tête et m'ébouriffe les cheveux. Espoir... Où est l'espoir quand on a besoin de lui. J'ai beau levé les yeux vers le ciel, je ne le vois toujours pas. Le soleil brille pourtant.


***


- Ouvrez votre livre page 17. Nous allons lire un extrait d'Émile.

Ils me regardent l'oeil mauvais. Un silence froid dans la salle. Pierre Bache affiche un rictus qui défigure son visage. Il va falloir mettre les choses au clair.

- Bon, je n'ai pas touché Camille !

Cette fois, ce sont des murmures qui emplissent la salle. Des regards sur les côtés, des interrogations et même un éclat de rire fugitif.

- Et pourquoi on devrait vous croire, demande alors Ulric ?
- En effet, j'ai pas la possibilité de le prouver. Et ma parole n'a pas plus de valeur que la sienne. Mais pourquoi devriez vous croire Camille ?
- C'est une des nôtres. Vous vous êtes un adulte. Vous ne faites rien d'autre qu'essayer de nous détruire.
- Une des vôtres ? Ne me faites pas rire. Vous savez aussi bien que moi ce qu'est votre classe. T'as des amis ici ? Vous savez très bien que vous êtes en marge, mais c'est votre faute ! C'est vous qui avez décidé de vous mettre à l'écart ! Je ne cherche qu'une seule chose depuis le début d'année ! Je Cherche à vous ouvrir l'esprit, à vous montrer comment tendre la main vers l'autre. On est toujours plus fort quand on pense ensemble que lorsqu'on pense seul !
- Et si des dizaines d'imbéciles se mettent à penser ensemble, ça nous donne notre planète actuelle. Votre raisonnement est stupide !
- T'as pas tort sur ce point. Mais c'est pour ça que vous êtes là et que vous recevez un enseignement. Pour ne pas commettre les mêmes erreurs. Vous vous sentez peut-être seul parmi des imbéciles mais ce n'est pas une raison pour renoncer. Vous n'avez pas le droit de vous contenter de vous mettre sur le côté et de regarder en critiquant. C'est trop facile. Donnez vous la peine !

Je me rends compte que je m'emballe, je suis en train de suer à grosses goûtes. Tout en m'épongeant le front avec un mouchoir, j'observe ma classe qui reste perplexe. Il faut que je continue. Je fixe Camille droit dans les yeux.

- Dis moi, tu comptes passer ta vie dans le mensonge ? Tu penses pouvoir tenir ? Tu crois que c'est facile ? C'est pas un jeu ! Ce sont des vies que tu brises !

Elle baisse les yeux et ne réponds pas.

- Écoute moi, revenir sur ce que tu as dit serait faire preuve d'un grand courage. Je sais que tu en es capable. Je ne t'en veux pas et je ne t'en voudrais pas. Fais moi confiance. Le monde n'est pas qu'un ramassis de pourris.
- Pourquoi on devrait vous croire, devenir optimiste, avoir la « foi » dans une humanité meilleur ? Pourquoi vous croire, demande Ulric ?
- J'étais comme vous avant. Asocial, sans véritable ami à part un. Cynique, sans espoir, et acide envers tout le monde. Mais je vous assure que la lumière existe ! Vous pouvez la trouver dans le regard de l'autre.

Je regarde Camille. Elle ne dira rien aujourd'hui. Je le vois au fond de ses yeux, elle n'est pas encore prête. Une boule d'angoisse se forme dans ma gorge, suis-je capable de donner un sens à la vie de ses futurs citoyens ?

- Je vous crois Monsieur. J'ai envie d'y croire moi. Vous m'avez convaincu.

Je tourne la tête et regarde incrédule Ulric. Je n'aurais jamais imaginé qu'il puisse prendre mon parti après toutes ces attaques verbales. Je souris et ferme les yeux. Savourant le moment.

- Le cours est terminé.
- Ça n'a pas encore sonné !
- Et alors ? Je te dis que c'est terminé. Tu fais ce que tu veux, si t'a envie de rester ici : libre à toi.
- Vous pouvez pas partir comme ça !
- J'ai donné ma leçon du jour. Je vous laisse le temps de l'assimiler. Bonne journée à tous. Quant à toi Camille, si jamais t'as quelque chose à nous dire : n'hésite pas.

Je sors de la classe. Laissant derrière moi des élèves estomaqués. Je salue de la tête Pascal. Puis je vais m'asseoir dans le parc de l'établissement. Je m'allonge, la tête vers le ciel, contemplant des nuages aux formes oniriques. J'entends pendant quelques instant des bruits de pas, puis plus rien. Juste une ombre à côté de moi.

- Merci. Ce sont les mots que j'attendais au fond de moi.
- C'est mon travail Ulric.
- Je ne peux que vous souhaitez courage. Baissez pas les bras, on a besoin de quelqu'un comme vous.
- Toi aussi tu vas avoir besoin de courage. Tu viens de te mettre à l'écart de la classe.
- Oui, mais j'ai gagné quelqu'un sur qui compter ?
- Oui, t'as gagné un ami.

Ulric passe sa main devant ses yeux et s'allonge à côté de moi. Je voudrais le serrer dans mes bras pour lui montrer que je suis avec lui, mais je me retiens. Je ne suis pas certain que sa fierté masculine apprécie ce geste.

***


Éd se tient devant moi. Les mains dans les poches, plutôt embarrassé et en sachant pas sur quel pied se tenir.

- Je pars demain.
- Longtemps ?
- 4 mois, peut-être 5. Ça dépend.
- Te pose pas de questions ! C'est la chance de ta vie.
- Mais et toi ?
- T'en fais pas pour moi ! Je vais m'en sortir. C'est peut-être le rôle de ta vie.
- T'es certain ?
- Moi je t'attendrais, pas les américains. Fais ce film et viens me raconter.
- Merci Jack.

Je fais craquer mes doigts. Je le fais souvent lorsque je suis nerveux. Éd le remarque. Il pose ses deux mains sur mes épaules et me regarde dans les yeux.

- On est ami. On le restera. Si t'as besoin de moi : appelle moi !
- Pas de problème.
- Je vais te laisser, j'ai un tas de chose à faire avant le départ.
- Bonne route Éd.
- Autant que la tienne Jack.

Je regarde Éd partir, un pincement au coeur. Mais heureux pour lui, c'est une chance incroyable qui s'offre à lui.

- Monsieur !

Je me tourne et découvre Ulric qui fonce vers moi.

- J'ai besoin de votre aide, c'est grave. Camille est en haut de son immeuble et menace de sauter.
- Oh merde. J'arrive.


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