Note de la fic : :noel: :noel: :noel: :noel:

Incarnation


Par : Sheyne
Genre : Science-Fiction, Fantastique
Statut : C'est compliqué



Chapitre 17


Publié le 11/12/2015 à 02:48:11 par Sheyne

Le Roi était anéanti. Écrasé par un piano... On ne trouvait pas mort plus stupide. Ça ne pouvait pas être une coïncidence... Quelque chose voulait qu'il meure, c'était prévu. Qu'était-il alors censé comprendre ? Pourquoi le ramener à la vie si proche du but, pour le tuer aussitôt ? Tourmenté, il ne savait quoi penser.

Perdue au sein de l'immense tourbillon d'âme, une fantastique lueur cyclopéenne le fixait. Rouge, elle était vide d'émotions. Son œil terrifiant l'angoissait, se moquait de lui. Mais cela ne dura pas. À son grand soulagement, le rideau tomba en un masque sombre et toute la scène fut couverte d'encre. Une encre si noire et si froide qu'aucune lumière ne parvint à l'atteindre. Les yeux, bien qu'ouverts, ne donnaient que sur le néant. Seuls subsistaient les sons et cette sensation de douleur intense, comme des braises fumant dans ses orbites.

Chaque endroit de son corps semblait se nécroser au point de lui arracher des hurlements abominables. Alors, il beugla et tenta de s'enfuir. Cela ne fit que secouer les lourdes chaînes rouillées. Tirer brusquement dessus cisailla ses poignets. Où était-il, bordel ?
Ses pieds ne touchaient pas le sol. Désespéré, accroché nu tel un pantin sur un mur glacial, battu à mort il ne put que crier encore.

Dans les ténèbres humides, un braillement explosa enfin :

« Putain, mais ta gueule !
— Qui ?! Qui êtes-vous ?!
— Et ça y est, il a encore perdu la boule...
— Merde... c'est quoi cet endroit, pourquoi on est dans le noir ?! »

Un bruit de métal résonna dans l'humidité ambiante et la conversation cessa aussitôt. De lourdes bottes. Des pas approchaient et le Roi paniqué supplia à nouveau :

« Pitié, aidez-moi... »

Aucune réponse, si ce n'était les battements de son cœur, en rythme avec le martèlement croissant au sol. Rapidement, un grincement strident accapara son attention. Ça venait juste en face de lui et il sut qu'une grille d'acier s'était ouverte dans la pièce. Alors dans l'obscurité accablante, il se sentit observé. Cela dura un interminable moment. En silence, un souffle chaud roulait sur sa nuque endolorie. Le seigneur craqua :

« Dites-moi ce qui m'arrive... »

D'un coup sec, une masse énorme lui broya l'estomac. Révulsé par l'uppercut, le Roi se plia en deux et les chaînes cinglantes le retinrent à nouveau, déchirant sa peau. Un liquide poisseux s'écoula, ruisselant le long de ses bras.
Crachant ses poumons dans une effroyable quinte de toux il crut y rester. Pris au piège comme un animal, le Seigneur voulut hurler, mais l'air lui manquait. Tout ceci sonnait comme un abominable cauchemar, mais la douleur était bien trop réelle, plus aiguisée que tout ce qu'il n'avait jamais pu ressentir.

L'assaillant était en face de lui, mais il ne le voyait pas, son impuissance était terrifiante. La folie le guettait... Il lui fallut une bonne minute avant qu'il puisse respirer convenablement et lorsqu'il tenta à nouveau de parler, une droite monumentale lui pulvérisa la mâchoire.

Les coups fusaient sans avertissement et ne pas pouvoir les anticiper était insoutenable. Son corps malmené était en piètre état. En plus des blessures et de l'odeur de sang, ses yeux suintants étaient évidemment crevés. Lorsqu'il bougeait la langue, ses gencives déchiquetées à moitié édentées le tétanisaient. Même ses mains semblaient amputées de plusieurs doigts. Alors, au comble de l'horreur, le Roi parvint à exhaler un murmure affligé :

« Tuez-moi... »

S'ensuivit aussitôt un rire sadique, et l'autre explosa grassement :

« Ooooh ! Tu es arrivé hier et tu veux déjà nous quitter ?! On a qu'une seule vie, autant faire durer le plaisir ! »

Sa voix était grave, à la limite de l’hystérie. Profitant de ce court instant de répit, l'âme en peine enchaîna sans réfléchir et ses paroles bavèrent :

« Où... Où... O
— HouHouHouHou. L'autre mima en s'esclaffant. Où tu peux être, à ton avis, sale merde ? Où vont les terroristes de ton espèce ?! Fais-moi plaisir, ferme ta gueule et laisse-moi au moins m'amuser un peu ! »

Joignant le geste à la parole, le tortionnaire enfonça un objet froid dans la poitrine de sa victime. Puis d'un coup sec, les deux bouts d'une pince amputèrent la peau, mirent les muscles à nu. La chaire tranchée, le Seigneur hurla et son cri se coupa net lorsqu'un fabuleux coup de poing lui éclata à nouveau le ventre. Si son estomac n'avait pas été vide, il aurait vomi depuis longtemps. Le temps de se reprendre, la seule pensée qui ébranla sa conscience suffocante fut le bonheur de ses précédentes vies. Elles étaient toutes si bien... Et là il était torturé comme un animal... Il ne méritait pas ça.

Une minute plus tard, il pleurait et suppliait :

« Pourquoi... Qu... Qu'est-ce que j'ai fais. Je ferais tout ce que vous voulez... »

Les lamentations n'eurent d'autres effets que de faire marrer le geôlier. Celui-ci pensait qu'il aurait bien le temps de poser ses questions plus tard. Alors, la lourde pince d'acier siffla dans un large moulinet avant de abattre sur le genou de son jouet. Dans un effroyable craquement, celui-ci explosa. Le Roi hurla, en victime misérable. Et l'autre repartit tranquillement en sifflant. Les pas s'éloignèrent tandis qu'il ricanait au loin :

« Bienvenue dans les geôles de Ragnar, sale con. »

Pitoyable, le Seigneur se noyait dans son mal. Sa jambe détruite lui fit rapidement oublier toutes les autres douleurs. Il devait mourir. C'était certain. Il devait y rester le plus vite possible. Chercher un moyen de s'enfuir d'ici. Mais, attaché et aveugle, il ne put rien trouver... Il crispa la mâchoire en se maudissant et ses dents à moitié cassées cisaillèrent l’intérieur de sa bouche. Au fond, c'était peut-être ça la solution.

Soufflant pour se donner du courage, il tendit ses traits au maximum. Un claquement sec plus tard, sa langue saignait, lui arrachant de lugubres gémissements. Il fallut s'y reprendre maintes fois pour la trancher. Alors, le sang coula à flots et il l'avala, tentant de s'étouffer avec.
Sa tête lui tournait, mais il poursuivit. Mâchant encore, au bord de l'évanouissement, il tailladait le gros bout de muscle restant tout en pleurant d'horreur. S'il s'en arrêtait là, il n'avait aucune garantie quant à son sort et n'aurait jamais la force nécessaire pour recommencer. Alors il continuait et priait pour que la mort vienne le prendre.

Au bout d'un temps interminable, il finit par perdre connaissance.


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